Les 10 commandements du parfait glaciairiste
- Prudence, et modestie.
- Estimation de ses capacités personnelles et de sa technique. De ses capacités du jour.
- Savoir en garder sous le pied et dans les bras (les brochages sont pénibles !).
- Bannir la fuite en avant, bien se protéger régulièrement.
- Anticipation. Anticiper les points d'assurage et les difficultés.
- Tous les sens aux aguets savoir regarder, écouter, sentir, comprendre. Savoir renoncer. . .
- Gérer ses efforts.
- Rester courtois avec les autres cordées, s'entraider.
- Bonne connaissance de la haute montagne hivernale, de la neige et des techniques de cascade
- Autonomie en terrain d'aventure, ascension pouvant se dérouler dans des vallons parfois très isolés.
Les idées fausses
- Celui qui met le moins de broches est le plus fort !
- Il vaut mieux voler que de se reposer sur une broche !
- Le libre à tous prix !
- Avec les chocs absorbeurs et les nouvelles broches on peu voler, on ne risque rien !
- Ce matin il fait -15 il n'y a aucun risque, c'est béton !
- La cascade est tracée, il n'y a aucun risque !
Conseils de sécurité des unités de secours en montagne (CRS & PGHM)
Lors des approches exposées ne pas hésiter à chausser les crampons dans des zones où la glace apparaît ou lorsque la neige est dure.
Pour s'équiper, se décaler du pied de la cascade et se mettre à l'abri.
Ne pas s'engager à plusieurs cordées dans une cascade sinon, se décaler mais toujours rester vigilant.
Aux relais relier les broches entre elles (Relais multi directionnel) et assurer directement son leader sur soi. Ne pas utiliser le relais comme point de renvoie. Préférer une broche juste au dessus avec un absorbeur de choc. Mousquetonner qu'un seul brin de corde, afin de réduire la force de choc en cas de chute.
Décaler les relais de la ligne de progression et l'installer dans un emplacement protégé (des chutes de glace ou de pierre).
La fuite en avant en glace est à proscrire. Ne pas aborder la glace comme l'escalade en falaise. La montagne comme la cascade sont des terrains d'aventures. En montagne vous ne volez pas, il en est de même en glace. Lorsque vous grimpez en glace vous avez des piolets aux mains qui piquent, des crampons acérés aux pieds, des broches très pointues autour du corps, ce sont de précieux alliées qui peuvent se retourner contre vous en cas de chute.
Même dans les endroits faciles, ne pas hésiter à brocher pour assurer sa protection.
Penser à protéger les traversées pour sécuriser l'escalade du second de cordée, rappelez vous que la moindre glissade avec crampons aux pieds peut vite devenir dangereuse.
Lors de la descente en rappel, attention aux cordes gelées. Une corde humide file très vite entre les gants, pensez à mettre un autobloquant.
En cascade, il faut rester humble.
Pour les descentes se renseigner et ne pas hésiter à tirer des rappels en mains courantes dans des zones avalancheuses ou faciles (torrent gelé), prévoir de quoi faire des lunules (cordelettes, couteau, crochet "Abalakof"). Ne pas hésiter à renforcer les relais, retaper les pitons chaque fois avant vous y vacher, remplacer les sangles décolorées. . .
Dans les zones paraissant facile, la glace peut être sous jacente à la neige, un bloc de glace venu du haut peut vous heurter et c'est souvent dans ses parties faciles que l'accident peut survenir.
Une plaque de glace est un plan de glissement idéal pour une accumulation de neige.
Une cascade est formée sous un bassin d'écoulement des eaux, c'est également le bassin d'écoulement des avalanches !
Attention au soleil qui peut taper sur les pentes supérieures de la cascade durant la journée et faire partir des coulées de neige ou dans certains secteurs comme a la Grave des free rider !
Assurage
Bien se protéger régulièrement même si c'est facile.
Bétonner les relais (minimum deux bonnes broches), les décaler par rapport à l'axe de progression de la longueur suivante pour ne pas se faire lapider par les glaçons du leader. Ne jamais faire de relais sur les piolets.
La difficulté première dans la progression est la gestion des points de protection. Mettre la bonne broche au bon endroit, ne pas attendre d'être en difficulté ou sur une glace pourrie pour se protéger. Penser à limiter le tirage des cordes, on peut utiliser les points naturels : arbres, blocs de rochers enchâssés dans la glace, colonnes (20 à 30 cm minimum de diamètre de bonne consistance).
Dans le terrain mixte ou en bordure de cascade penser à utiliser le matériel de protection de rocher (pitons, coinceurs).
On est en terrain d'aventure et l'on doit mousquetonner qu'un brin de corde en alternance dans chaque dégaine (sauf pour les cordes jumelées, où l'on mousquetonne les 2 brins). Ceci permet de diminuer la force de choc donc de moins vous faire sécher en cas de vol, de moins solliciter les broches à l'arrachement et d'éviter le tirage. Pour améliorer la fluidité de la corde, il est possible de mousquetonner le même brin dans deux broches successives, de rajouter des sangles.
Attention : si vous grimpez à trois en flèche, dans les traversées, penser à l'assurance des deux "seconds". Il faut faire le choix entre mousquetonner les deux brins, pour bien assurer les seconds ou être mieux protégé en mousquetonnant qu'un brin !
Les absorbeurs de choc permettent d'améliorer de manière significative la résistance des broches à l'arrachement. En mettre en priorité sur la première broche au dessus du relais puis sur les broches douteuses et dans les passages difficiles. L'idéal étant d'en mettre sur tous les points !
Difficultés
Elle peut changer en fonction de la qualité, de la dureté de la glace, de son épaisseur. La difficulté peut augmenter s'il les passages sont recouverts de neige. Elle peut varier d'un jour à l'autre.
Si vous êtes le premier à passer, il faut nettoyer les passages ce qui demande plus d'énergie. Un passage nettoyé ou pas peut changer la difficulté d'un degré. Il est conseillé au néophyte de faire ses premiers pas sur des sites ou les cascades sont régulièrement grimpées et avec une température proche de zéro.
La difficulté donnée dans les topos est simplement une idée approximative, mais elle peut prendre ou perdre un degré en fonction de la qualité de la glace.
La cascade de glace ne doit pas être abordée avec le même état d'esprit que l'escalade en falaise. On est loin du terrain aseptisé. Même si la plupart des sites sont situés en moyenne montagne, il s'agit de terrains d'aventures en condition hivernale avec beaucoup d'aléas quant aux risques d'avalanches, qu'il faut bien appréhender, à l'isolement, aux accès longs, aux descentes hypothétiques et à la qualité de la glace qui peut changer d'heure en heure ! L'hiver les journées sont très courtes et un rappel gelé, les amarrages que l'on s'exténue à chercher sous la neige, les traces de chamois de la semaine passée qui sont effacées et qui devaient nous montrer la bonne vire de descente risquent de nous obliger à un bivouac des plus inconfortable avec une température loin sous zéro ! Le portable qui ne passe pas, les batteries qui sont à plat avec le froid . . . l'hiver tout prend une autre dimension, une autre démesure. Il faut toujours prévoir une très grande autonomie.
En cas d'accident
En cas de dévissage, toujours suspecter un traumatisme de la colonne, de la tête, des hémorragies internes (mal au ventre?), externes.
Prévoir une couverture de survie par personne et éventuellement des chaufferettes au fond du sac pour prévenir un éventuel risque d'hypothermie.
Attention aux risques d'hypothermie consécutifs à un accident.
Ayez toujours sur vous les numéros des secours locaux CRS / PGHM, pompiers (18) ou le 112 (N° International). Vérifier que votre portable passe.
Ascension
Savoir renoncer. Changer d'objectif s'il y a d'autres cordées engagées sur le même itinéraire ou bien se décaler : Exemple : un glaçon de 50 cm qui chute de 100 m peut balayer le pied de la cascade sur 30 m !
Repérer les difficultés (passages délicats pour anticiper les protections ou contourner le passage).
Anticiper les protections (point de renvoie au départ du relais), préparer son matériel au pied de la longueur en conséquence, l'organiser chronologiquement sur son porte matériel). Les pitons/coinceurs ne vous seront utiles que s'il y a du rocher dans la longueur ! ! !
Conseils
Bien plus que les glaciers, les couloirs et les goulottes, la cascade de glace, par la variété des reliefs qu'elle possède, colonnes, bossettes, méduses, bulles, ainsi que par la métamorphose constante de sa structure, apporte à la pratique de l'escalade glaciaire une fantaisie et une richesse nouvelles. Les cascades, formées par le gel de l'eau courante (fonte de névés, torrents, résurgences rocheuses), peuvent se construire en quelques jours. Le meilleur moment pour grimper se situe lors d'un réchauffement ambiant modéré car celui-ci donne à la glace une plus grande plasticité et un meilleur amorti des ondes de choc. Dans ce cas, il faudra prendre bien soin de ne pas trop attendre car lors de la fonte, la glace perdra rapidement sa cohésion première.
Si une période de froid survient après ce réchauffement, l'escalade sur glace deviendra fastidieuse, le regel de surface faisant éclater la glace (en"assiettes") sous les coups de piolet.
Le relais c'est-la vie de la cordée. Il doit être :
- Inarrachable
- Fonctionnel
- Confortable
- A l'abri des chutes de glace et coulées de neige
Quels que soient l'inclinaison de la cascade, la qualité de la glace, et le facteur de chute, un relais ne doit jamais s'arracher.
Quelques conseils techniques
Observez la structure et les dangers objectifs éventuels avant de vous lancer.
Evitez de vous engager dans une cascade si une cordée s'y trouve déjà.
Organisez le matériel sur vous avant de démarrer et essayez de bien viser l?endroit où vous allez ancrer un piolet ou poser le crampon.
Ne vous faites jamais bloquer sur une broche et encore moins sur votre piolet par votre camarade (effet de poulie) mais vachez vous dessus si besoin.
Portez un casque si vous voulez vivre longtemps et pensez qu'il vous protège autant des chutes de glace ou de pierres que des chocs durant votre chute.
Entretenez votre matériel et changez souvent vos lames (dès l'usure de la 1ère dent), vous apprécierez la différence.
Rappelez-vous que la connaissance de cette matière changeante qu'est la glace, la subtile perception des ancrages ainsi que la mise en place correcte des broches nécessitent de l'expérience.
S'il arrive parfois que l'on se sente très seul et très dépourvu de courage lorsque après avoir quitté le relais depuis bien longtemps comptant les broches qui nous restent comme un guerrier compte ses dernières cartouches, l'essentiel pour continuer sera le désir de réussir et la capacité à dominer sa peur.
Ce sont du reste ces moments privilégiés qui nous font prendre conscience de l'incroyable force de caractère qui peut et doit parfois nous animer ...
La verticalité, l'engagement, le côté aléatoire des protections ainsi que l'aspect changeant de la matière, font de la cascade de glace une activité sérieuse et particulière.
Christophe Moulin (guide de montagne)